Martin Luther est aujourd’hui considéré comme le premier des grands réformateurs et comme le premier théologien protestant. Mais, s’il est bien devenu un réformateur, il n’a jamais cherché à l’être : c’est uniquement en réaction aux événements et aux demandes insistantes de ses disciples qu’il construit un système théologique « luthérien ». Cette figure de théologien que l’on associe à Luther est, d’une certaine manière, un aveu d’échec : faire du prophète de Wittenberg un réformateur, c’est admettre implicitement que son propre idéal, purement spirituel et intérieur, a dû être « réformé » pour s’adapter à la réalité et encadrer le peuple luthérien.
17 juillet 1505. Un homme de vingt-deux ans entre, contre l’avis de son père, au couvent des Augustins d’Erfurt. Sa décision est motivée par une succession d’événements qui lui sont arrivés depuis l’année 1501 : accumulation de maladies qui l’affaiblissent, épouvante devant une peste meurtrière, accident sanglant et, surtout, ébranlement causé par un coup de tonnerre qui menace de le tuer entre Erfurt et Stotternheim. Pensant que Dieu le châtie pour ses péchés, ce jeune homme nerveux et tourmenté décide de faire pénitence par le seul moyen dont il dispose : se faire moine. Le nom de ce moine, encore inconnu, résonnera bientôt dans toute l’Europe chrétienne : Martin Luther.
Arrivé au couvent pour y rencontrer Dieu, Luther n’y trouve que la terreur et le doute. Moine consciencieux et plus que zélé, le jeune homme a pourtant le sentiment de ne pas parvenir à plaire à ce Dieu implacable qu’il craint et hait à la fois. Les crises d’angoisse se font de plus en plus fréquentes et de plus en plus pressantes. Pour les apaiser, notre moine multiplie les actions de pénitence et d’expiation, sans que celles-ci ne le calment, bien au contraire. Car que sont ces actions, purement humaines, face à un Dieu saint et juste ? Luther le sait bien : jamais il ne pourra être accepté d’un tel Dieu, impitoyable et rigoureux dans le décompte de ses péchés. Jamais il ne pourra atteindre le salut promis au chrétien.
C’est donc bien à un Luther effondré et écrasé par la dépression que le vicaire général des Augustins, Johann von Staupitz, confie, de 1513 à 1516, la charge d’un cours sur les Psaumes et sur l’Épître aux Romains. Au contact de cette dernière, Luther est terrassé, tel son auteur — l’apôtre Paul — sur le chemin de Damas. Jusque-là assailli par le doute et l’angoisse, il rencontre, probablement en 1515, la paix intérieure et la certitude de son salut. Sa conception de Dieu change alors du tout au tout. En particulier, le moine augustin prend conscience que « le juste vivra de foi » (Rom. 1, 17) et que « vous êtes sauvés par la grâce, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » (Éph. 2, 8). Autrement dit, à son effort surhumain et sans cesse défectueux pour plaire à un Dieu juste et implacable succède l’action d’un Dieu de grâce qui sauve et justifie lui-même, par amour pour sa créature, le pécheur. Le chrétien est ainsi, par la foi, simul justus et peccator, pécheur du fait de son appartenance au monde mais simultanément juste devant Dieu pourvu qu’il place sa foi dans la grâce divine.
La découverte de Martin Luther reste pour lors purement spirituelle et intérieure. Elle ne présage ni d’une volonté de réformer l’Église, ni de la rupture avec Rome qui s’ensuivra. Luther, dans les années 1510, connaît une expérience mystique qu’il ne cherche pas immédiatement à extérioriser. Ainsi que l’affirme l’historien Lucien Febvre dans Martin Luther. Un destin (1928), « Ce qui importe à Luther, de 1505 à 1515, ce n’est pas la Réforme de l’Église. C’est Luther. L’âme de Luther. Le salut de Luther. » Le moine augustin n’a rien, en 1517, d’un théologien, encore moins d’un réformateur : c’est un mystique. Néanmoins comme le souligne Febvre, « son remède, Luther ne songeait pas à le garder pour lui ». Il souhaite en effet que ses contemporains puissent également en faire l’expérience et découvrir à leur tour la vérité qu’il a vécue. Luther trouve finalement une occasion d’extérioriser sa foi intime en 1517, grâce à l’affaire des indulgences. Cet événement le pousse à adopter une nouvelle posture : celle du prophète.
Le choc des indulgences : du mystique au prophète
Pendant que Luther se retire dans son intériorité et dans ses expériences mystiques, le pape Léon X, qui cherche à financer la construction de la cathédrale de Saint-Pierre à Rome, autorise l’archevêque Albert de Brandebourg à vendre des indulgences dans son archevêché, en 1515. Les indulgences sont ces « remises devant Dieu de la peine temporelle due pour les péchés dont la faute est déjà effacée ». Mais elles ont de plus en plus tendance à être perçues comme des remises de peine du temps passé dans le purgatoire après la mort. L’achat d’indulgences permettrait ainsi au croyant de réduire le temps d’expiation post-mortem. C’est du moins ainsi que cet acte est présenté par des prédicateurs zélés, tels le frère dominicain Johann Tetzel.
L’arrivée et la commercialisation des indulgences à Wittenberg, ville où Luther enseigne, poussent le moine augustin à réagir. La vente des indulgences est contraire à son expérience spirituelle, selon laquelle Dieu justifie le croyant gratuitement, par pure grâce, et non en échange d’espèces sonnantes et trébuchantes. Le 31 octobre 1517, Luther rend publiques ses « 95 thèses », dans lesquelles il dénonce le trafic des indulgences. Il convient d’emblée de noter le caractère modéré d’une telle dénonciation. D’une part, de nombreux théologiens partageaient les critiques luthériennes. L’université de théologie de la Sorbonne avait ainsi condamné des propos identiques à ceux de Tetzel. Quelques-uns étaient même allés beaucoup plus loin que Luther. D’autre part, la critique luthérienne n’a rien de radical. Luther ne s’en prend ni à Tetzel, ni à Albert de Brandebourg, ni même aux indulgences en elles-mêmes : seule la fausse sécurité que confère l’indulgence au croyant quant à son salut est dénoncée. Bien plus, le pape est perçu, dans plusieurs des « 95 thèses », comme un allié potentiel. Rien n’annonce une rupture avec Rome. Mais, si le geste de Luther n’est pas révolutionnaire en soi, les conséquences d’une telle critique le sont effectivement. Ainsi que le note Lucien Febvre, « qui jette un cri ne sait jamais quels échos réveillera sa voix »…
Car la voix de Luther met en branle un mouvement qui la dépasse. Elle se confond en réalité, en 1517, avec « la voix d’une Allemagne inquiète, sourdement frémissante de passions mal contenues, et qui n’attendait qu’un signal, qu’un homme, pour révéler publiquement ses désirs secrets ». La natio germanica, est en effet en état d’ébullition en ce début de XVIe siècle. Dans cette Allemagne sans État centralisé mais dont le sentiment national se développe, dans cette Allemagne très pieuse mais anticléricale et antiromaine, dans cette Allemagne grevée par l’impôt et considérée comme la « vache à lait » de Rome, dans cette Allemagne secouée de transformations sociales et de révoltes nobiliaires ou paysannes, toute étincelle peut provoquer une explosion. Et cette étincelle se nomme, en 1517, Martin Luther.
Dès lors, Luther est pris, visiblement malgré lui, dans l’engrenage des événements. Le contexte le pousse à sortir de son mysticisme et de son intériorité pour se faire le porte-parole de la nation allemande. Luther devient alors prophète : il est contrait d’exposer sa spiritualité contre l’édifice ecclésiastique romain et, ce faisant, il incarne les revendications de son peuple. Comme le note Febvre, « Luther, ni un docteur, ni un théologien : un prophète. Et parce qu’il était tel, il allait réussir ce tour de force prodigieux : prendre la tête d’une Allemagne anarchique et lui donner pour un instant l’illusion qu’elle voulait, d’une volonté unanime, ce qu’il voulait, lui, de toute sa passion ; il allait, pendant quelques mois, de mille voix dissonantes, faire un chœur magnifique lançant à travers le monde, d’une seule âme, un chant unique : son choral. » 1517-1521 constitue bien le « moment Luther », court moment durant lequel l’Allemagne se range presque à l’unisson derrière le message porté par le prophète de Wittenberg.
Luther contre Rome ou Rome contre Luther ?
Face à cette menace, Rome réagit fermement. Quoique la critique luthérienne ne soit pas en soi radicale, « Luther […] était, dans une Allemagne fragile, un démolisseur menaçant ». La curie romaine choisit la voie de la répression. Malgré les tentatives de conciliation d’un Érasme, Léon X décide, en 1520, de publier la bulle Exsurge Domine exigeant la rétractation de Luther. Or, Luther a allumé un incendie qu’il ne saurait éteindre. Ne pouvant trahir ni sa « raison de vivre, de croire et d’espérer », ni les attentes de la natio germanica qui reposent désormais sur lui, le prophète de Wittenberg est contraint de choisir la voie de la radicalisation. En 1520, il publie ce qu’il est coutume d’appeler les quatre grands traités réformateurs, dans lesquels il tente d’unifier les Allemands en attaquant Rome et en assimilant le pape à l’antéchrist. Ainsi, la rupture entre l’Église romaine et Luther est autant, sinon plus, le fait de Rome que de Luther : « En le chassant sans répit et presque sans débat parmi ces hérétiques criminels dont il faut étouffer les idées dans l’œuf, elle le chassait peu à peu hors de cette catholicité au sein de laquelle pourtant, de toute son évidente sincérité, il proclamait vouloir vivre et mourir. Elle acceptait le schisme, elle courait au-devant de lui. Elle fermait, sur la route de Martin Luther, la porte pacifique, la porte discrète d’une réforme intérieure », note Lucien Febvre. C’est bien la crispation de Rome qui entraîne la radicalisation de Luther. Désormais, « il y aurait des réformes ; mais la Réforme [de l’Église universelle], non ». Le schisme est consommé : le protestantisme est né.
Toutefois, cette rupture n’entraîne pas immédiatement la construction d’un dogme ou d’une Église alternative concrète. Luther n’envisage pas de se faire réformateur : son rôle de prophète lui suffit. Ainsi que l’affirme Febvre, « l’augustin n’avait pas de plan formé ». S’il admet la nécessité de réformer l’Église, il ne propose pas de modèle alternatif d’Église et se contente d’une « Église invisible », une « Église de vrais croyants », une Église idéale caractérisée par une communion des fidèles qui seraient tous prêtres. Luther est ainsi « l’idéaliste de 1520 », le prophète d’une Église parfaite mais irréelle. Il ne cherche pas à construire une Église terrestre : il n’est pas réformateur, seulement prophète.
Et c’est bien en prophète, en idéaliste, que Luther choisit de se rendre, sur la convocation de l’empereur Charles Quint, à la diète de Worms en 1521. Pour Febvre, « Luther est allé à Worms comme on marche au feu. […] Luther est allé à Worms comme au martyre, ou au triomphe : deux aspects, après tout, d’une même réalité. […] Jamais son idéalisme ne fut plus pur qu’alors et plus intransigeant. » Il s’agit, pour l’homme de Wittenberg, de témoigner de sa foi jusqu’à la mort, d’affirmer un idéal sans se soucier des conséquences. Ses paroles, célèbres, en témoignent : « Je suis lié par les textes que j’ai apportés ; ma conscience est captive dans les paroles de Dieu. Révoquer quoi que ce soit, je ne le puis, je ne le veux. Car agir contre sa conscience, ce n’est ni sans danger, ni honnête. » La figure du prophète, de l’idéaliste, atteint ici son point culminant : poussé par une force intérieure qui le transcende, Luther est contrait d’exposer son idéal ; il ne peut faire autrement, même sous la menace du martyre. Il n’a que faire de l’autorité politique et de ses intimidations : il la défie au nom de son Dieu et de sa conscience. Convaincu de sa fin, Luther cherche à ce que celle-ci soit glorieuse — c’est-à-dire qu’elle glorifie Dieu.
Du prophète au réformateur : l’échec d’une vie
Mais Luther ne meurt pas, peut-être à son plus grand dam. Ainsi que le dit Febvre : « Oui, Luther aurait dû mourir [à Worms] : n’avait-il pas dit tout ce qu’il avait à dire ? » Car la suite de la vie de Luther n’est, d’après l’historien, qu’une longue déchéance, le constat fataliste d’un idéal brisé, la fin d’un rêve. Le principe de réalité prend le pas sur celui de l’idéal. Le prophète devient vite désabusé : le miracle n’opère plus et, plutôt que l’action de Dieu, il ne voit à l’horizon que le chaos humain.
Car, dès que Luther s’absente, le chaos s’empare de l’Allemagne. Le 4 mai 1521, le prince-électeur de Saxe, Frédéric le Sage, craignant pour la vie de Luther après l’épisode de Worms, décide d’enlever l’homme de Wittenberg à la Wartburg afin de le protéger. Luther profite de cette drôle de captivité pour traduire la Bible en Allemand. Mais, pendant qu’il s’échine sur son nouvel ouvrage, Wittenberg s’enflamme. Le camp luthérien se divise entre, d’une part, les modérés, unis derrière Philippe Melanchthon, qui cherchent à maintenir l’édifice ecclésiastique existant tout en le réformant en douceur, et, d’autre part, le camp radical, qui se range derrière Andreas Carlstadt, dispose d’un soutien populaire parfois extrémiste et se déclare partisan d’une réforme rapide et totale. Malgré leur antagonisme, ces deux tendances, réformiste et révolutionnaire, s’accordent toutes deux sur la nécessité d’établir une Église « concrète » — loin des envolées lyriques de Luther sur l’« Église invisible » —, hiérarchisée pour les modérés, populaire pour les radicaux. C’est donc sur la question du modèle d’Église, le grand impensé de Luther, que ses partisans s’affrontent. Or, les écrits de Luther ne donnent aucune orientation concrète de réforme. « Car, comme le dit Febvre, ce qui sort de l’âme ardente de ce grand visionnaire, de ce grand lyrique chrétien, c’est un poème. Ce n’est pas un plan d’action. »
Lorsqu’il rentre à Wittenberg, Luther ne peut que constater les dégâts. L’Allemagne jadis unifiée autour de son idéal est plus que jamais divisée, entre catholiques, luthériens modérés et adeptes de la « réforme radicale ». Son rêve de communion des croyants autour du Dieu de grâce est définitivement brisé. Luther condamne la réforme populaire, qui apporte selon lui le chaos, sans pour autant préciser la direction que doit prendre la réforme qu’il désire. Malgré les demandes pressantes de Melanchthon, il se mue dans un silence désabusé : « À force d’insistance, on lui arrache quelques esquisses d’organisation cultuelle. Mais provisoires. Mais partielles. » Pressé par ses partisans de se faire réformateur, Luther ne le devient qu’à contrecœur, abandonnant ainsi à regret son rôle de prophète.
C’est surtout la révolte des paysans de 1524-1525 qui achève de détruire le rêve luthérien. L’état de tension dans lequel se trouve le Saint Empire romain germanique, l’incertitude concernant le modèle que la réforme doit prendre ainsi que diverses crises économiques et sociales poussent les paysans à s’unir autour de Thomas Müntzer, un partisan de la « réforme radicale », et à se révolter contre les autorités princières. Et ce au nom de Luther : « c’était le tragique de la situation (nous dit Febvre) : ces hommes à qui Luther disputait les foules, c’étaient de Luther lui-même, de son exemple, de sa révolte qu’ils se réclamaient pour le dépasser. » Ce qui conduit à une situation de quiproquo tragique : Luther, « héraut de la parole », pour qui « la Parole ne s’applique point aux problèmes du siècle », voit dans les revendications des paysans la pire des perversions pouvant s’abattre sur la réforme, une « caricature » de son idéal ; les adeptes de la « réforme radicale » et les paysans voient au contraire en Luther un hypocrite et un couard, qui refuse de mettre en pratique sa propre parole. Pour Luther, la liberté du chrétien est purement intérieure et ne peut être le prétexte d’une révolte nécessairement peccamineuse ; pour les paysans, elle doit s’extérioriser et se traduire par une transformation du monde, une abolition de tous les esclavages et de toutes les oppressions. Dès lors, la révolte des paysans pousse Luther vers les princes et le conduit à appeler à la répression. Prenant un temps la posture du conciliateur, Luther finit par encourager les princes à mater la rébellion. Celui qui avait défié l’autorité politique à Worms somme désormais les princes, quatre ans plus tard à peine, d’écraser dans le sang toute révolte. De prophète s’insurgeant contre l’autorité au nom de Dieu, Luther est devenu, malgré lui, le réformateur des princes, l’organisateur d’une Église d’État.
Le reste de la vie de Luther constitue, pour Lucien Febvre, une forme de déchéance. Luther, maintenant « pape de Wittenberg » (Pierre Chaunu), succombe à tout ce qu’il avait condamné auparavant, lors de sa période mystique et prophétique : honneurs, richesses et même concupiscence. Il vit désormais, dans ces « années de repli », « bourgeoisement, prudemment » et « banalement », selon les mots de Febvre. Il « s’assied dans la vie. Un peu pesamment ». Installé, par le prince-électeur, dans son ancien couvent devenu propriété d’État, il se marie, prend du poids, se résigne à une vie bourgeoise. Il laisse son ressentiment contre les catholiques, les Juifs et le Turc se développer et sa pensée prend un tour ouvertement conservateur. S’il ne renie pas son idéal, il le prend pour ce qu’il est : un idéal, c’est-à-dire une idée inatteignable ne pouvant être retranscrite dans le monde réel. Durant cette période, « le prophète somnole en Luther » et ses réveils se font de plus en plus rares… Le destin de Luther sera d’être réformateur, d’instaurer une nouvelle Église si semblable à celle qu’il dénonçait.
Si la vie de Martin Luther est, comme l’affirme Lucien Febvre, « un destin », ce destin est successivement tragique et dramatique. Tragique en 1524-1525, lorsque l’idéal du prophète Luther se brise sous ses yeux. Puis dramatique ensuite, lorsque l’homme de Wittenberg accepte la vie bourgeoise d’un réformateur de l’Église. Le récit de la vie de Luther est bien celui d’un échec. Mais derrière cet échec apparent se cache une victoire, que traduisent l’épisode de Worms et l’irruption de l’éternité dans un moment historiquement situé, le « moment Luther » (1517-1521). Laissons à Lucien Febvre le soin de conclure : si le réformateur a bien « le droit d’être triste » — tant l’Église qu’il a fondée est une « contrefaçon dérisoire » de ce contre quoi il s’est battu —, « le prophète, non. Car il ne s’était pas trompé : il n’y a pas de douanes, pas de prisons pour les idées. Elles sont insaisissables et proprement indestructibles. »